L'architecture régénérative repousse les limites de la conception durable
L'approche actuelle est insuffisante
Le problème de l'architecture durable est qu'elle se contente souvent d'essayer de contenir les dommages plutôt que de les inverser. La communauté des architectes s'efforce de durabiliser les méthodes de production afin de préserver l'état actuel de l'environnement. Les bâtiments écologiques traditionnels utilisent des éléments actifs et passifs pour réduire la consommation d'énergie et préserver les ressources. Cependant, de nombreuses conceptions durables considèrent les bâtiments comme des objets autonomes, séparés de leur contexte écologique plus large. Compte tenu des défis pressants auxquels notre planète doit faire face, cette approche est insuffisante. Préserver l'environnement naturel ne suffit pas. Nous devons contribuer activement à la restauration de ses processus écologiques.
Qu'est-ce que l'architecture régénérative ?
En biologie, la régénération désigne la capacité des organismes et des écosystèmes à se renouveler, à se régénérer ou à se développer conformément aux cycles naturels. Appliquée à l'architecture, elle consiste à créer des structures qui imitent les propriétés réparatrices de la nature. L'architecture régénérative utilise l'environnement naturel comme matériau, mais aussi comme moteur actif de la conception. Les systèmes vivants du site deviennent les éléments constitutifs du bâtiment, élaboré en harmonie avec l'écosystème local.
L'architecture régénérative exige une approche progressiste. Contrairement aux bâtiments durables traditionnels, qui visent à minimiser les dommages écologiques, l'objectif des bâtiments régénératifs est de réparer les dommages et d'avoir un impact positif net sur la nature. Pour passer d'un modèle durable à un modèle régénératif, les architectes doivent réfléchir à comment concevoir des structures qui utilisent des ressources limitées, mais contribuent aussi activement à leur régénération. La régénération vise également la création d'un environnement plus résilient, mieux à même de résister aux défis inévitables de l'avenir.
Design régénératif versus design durable
Bien que la conception durable et régénérative semblent être des approches différentes, la durabilité s'intègre dans modèle régénératif plus large. Les deux pratiques se recoupent et partagent des techniques similaires, mais avec des objectifs différents. Alors que la durabilité s'attache à réduire la consommation des ressources, la régénération se concentre sur la reconstitution et la revitalisation de ces ressources. Les pratiques durables constituent la première étape en réduisant la consommation des ressources, mais c'est le design régénératif qui s'attache réellement au renouvellement et au rétablissement des systèmes naturels.
La différence essentielle entre les deux approches réside dans l'échelle des interventions. Le design régénératif considère les bâtiments comme faisant partie intégrante de l'environnement – que ce soit le paysage, la flore ou la faune, ou encore l'écosystème au sens large. Les bâtiments sont conçus pour contribuer activement à la production et à la distribution de ressources telles que l'eau potable, l'énergie et la nourriture. C'est le cas de la façade bioréactive SolarLeaf de Splitterwerk et ARUP par exemple : elle génère de l'énergie renouvelable à partir de la biomasse des algues et de la chaleur solaire. Cette énergie peut être utilisée par le bâtiment, stockée pour une utilisation ultérieure ou distribuée au réseau électrique.
La pensée systémique en architecture
Lors de la conception d'un environnement régénératif, il est important d'adopter une approche systémique. Cela signifie qu'il faut identifier toutes les entités pertinentes et leurs interrelations afin de mesurer leur impact sur l'ensemble de l'écosystème. La conception doit tenir compte du lien entre le bâtiment et le microclimat, du rôle du sol par rapport à la flore locale et de l'interaction entre le bâtiment et les autres systèmes naturels. L'objectif est de créer des connexions et un soutien mutuel, afin d'aboutir à un équilibre entre ce qui est donné et ce qui est pris, donnant ainsi un écosystème robuste et florissant.
Les architectes ne devraient plus se limiter à la création d'objets individuels, mais s'attacher à concevoir des systèmes plus larges, contribuant à l'avenir de notre société. La pensée systémique permet aux architectes de comprendre le rôle et la place de l'environnement au sein de réseaux sociaux, environnementaux et économiques, qui sont en constante évolution et pour lesquels les méthodes de conception traditionnelles sont de moins en moins adaptées.
La nécessité d'un design régénératif
Le design régénératif est fermement ancré dans une approche systémique. Les interventions peuvent prendre différentes formes, comme le "biomimétisme", par exemple (= science et technique consistant à imiter les idées biologiques de la nature), ou encore l'imitation des processus naturels, les façades purifiant l'air, les structures purifiant l'eau ou l'architecture stockant le carbone. Le passage d'un design durable à un design régénératif offre une stratégie beaucoup plus puissante pour faire face à la crise qui touche actuellement le climat et la biodiversité à l'échelle mondiale. L'architecture régénérative permet de transformer l'industrie de la construction, de passer d'une attitude visant à "limiter les dégâts" à une démarche "réellement positive".
Source : archdaily