Dans quelle mesure vos machines sont-elles connectées et transparentes ?
Ce projet a vu le jour parce que Sirris a remarqué que de nombreuses entreprises se posaient des questions. La production connectée semble encore lointaine pour bon nombre d’entreprises, et c'est précisément là que Sirris veut apporter du changement. "Nous voulons aider les entreprises à y accéder plus facilement", déclare Jakob, "en expliquant clairement ce qu'implique la production connectée, quels sont ses avantages et comment se lancer dans celle-ci. Nous voulons inspirer les entreprises afin qu'elles constatent que toutes les entreprises peuvent en tirer profit, y compris les petites PME."
Une avancée qu’il décrit joliment en ces termes: la démocratisation de la technologie. Ce projet, auquel participe également Flandres Make, est soutenu par VLAIO.
La production connectée pour les nuls
Que faut-il s’imaginer exactement quand on parle d’environnement de production connecté? Il s'agit de connecter des machines et des applications professionnelles pour accroître la productivité et la transparence.
"Une production transparente permet de savoir en temps réel ce qui se passe et pourquoi", explique Jakob. "Vous pouvez dès lors intervenir et prendre des mesures d'amélioration ciblées. Votre production devient ainsi beaucoup plus réactive."
Même si chaque situation est unique, on dénombre quatre scénarios plus fréquents, que Sirris souhaite approfondir.
Premièrement, il peut s'agir de générer différents tableaux de bord pour diverses applications, qui donnent un aperçu en (quasi) temps réel de ce qui se passe dans la production. "Un tel tableau de bord pourra servir aux directeurs de la production afin qu'ils puissent évaluer l'efficacité de tout le processus, mais aussi aux opérateurs en leur donnant un aperçu du statut de la production, ou aux deux. Vous pourrez également l'utiliser pour identifier et traiter les goulots d'étranglement."
Production transparente
Une deuxième possibilité consiste à coupler les données de l'atelier de production au système d’ERP existant afin d’harmoniser la planification à l'état actuel de la production.
"Dans de nombreuses d'entreprises, les commandes sont créées dans un système d’ERP, mais une fois qu'elles sont en production, vous n'avez plus aucune vue sur celles-ci jusqu'à leur finalisation. Cela provoque de nombreux problèmes et discussions lorsque vous voulez contrôler le statut de telle ou telle commande sur la ligne de production. Rendre ce processus transparent vous permettra également de beaucoup mieux estimer la capacité de production. Vous pourrez immédiatement voir s’il vous reste de la marge pour d'éventuelles commandes supplémentaires ou détecter les éventuels problèmes de capacité. Il ne faudra plus ‘deviner’ le taux d’occupation ni ce que vous pourrez faire pour élever votre rendement."
Ce sera plus clair avec un exemple. Jakob a participé à un projet pour l’entreprise de pierre naturelle Renier: "La production y était déjà très automatisée. On y dénombrait deux robots, un pour alimenter une machine et l'autre pour la finition des pierres. Cependant, tout ce qui se trouvait entre ces deux étapes était opaque pour l'entreprise. Sans entrer dans les détails techniques, son projet lui a permis de désormais savoir pour chaque palette quelles pièces se trouvent sur celle-ci, où elles sont allées et où elles doivent aller. À l’aide de ces données, l’entreprise peut aussi maintenant évaluer l’efficience de la production et détecter quand un élément pose problème. Connaître le statut de la production à tout moment permet de prendre des mesures correctives, et donc d'améliorer la productivité et le rendement."
Des machines et opérateurs plus efficaces
Une troisième possibilité concerne l'échange de données entre l'entreprise productrice et le constructeur/intégrateur de machines pour le démarrage des services digitaux pour les clients par les constructeurs de machines ou les intégrateurs. "Ce que les entreprises ne sont pas toujours enclines à faire, jusqu'à ce qu'elles sentent que leurs machines deviendront plus efficaces en le faisant."
Quatrième possibilité, enfin: l'utilisation optimale des données de production pour un encadrement plus ciblé des opérateurs. C'était le cas, par exemple, chez Aluro CNC. "Les opérateurs y étaient continuellement sollicités", explique Jakob. "Ils devaient constamment regarder partout pour voir si les lots tournaient sur leurs machines, ou surveiller les arrêts de production. Ce qui était assez stressant. En captant les données des différentes machines et robots et en les affichant sur un tableau de bord, la production est devenue beaucoup plus transparente, permettant ainsi aux opérateurs de se faire une meilleure idée de ce qui va se passer et à quel moment."
"Chaque opérateur a reçu une tablette sur laquelle il peut consulter le statut de production des machines dont il est responsable. Il peut maintenant voir, par exemple, que telle ou telle machine sera prête dans cinq minutes et qu'il devra donc terminer autre chose avant de commencer à travailler sur celle-ci. L'impact de l'atelier de production connecté est ici principalement émotionnel: le travail proprement dit ne change pas, mais les opérateurs ont désormais une emprise sur le processus. En outre, l'entreprise peut désormais réagir plus rapidement en cas de problèmes ou d’arrêt de la production."
Impliquer les collaborateurs: une exigence
Si, chez Aluro CNC, le bien-être de l'opérateur était au centre des préoccupations, ce n'est pas toujours le cas. Pire encore, dans certains cas, les travailleurs vivent les changements comme des contraintes supplémentaires et pas comme des progrès.
"Nous intervenons alors parfois comme la petite voix critique qui incite la direction à réfléchir à l'impact sur les collaborateurs dans l'atelier. Un système doit offrir des avantages tant pour la direction que pour les opérateurs. Les meilleurs résultats s’obtiendront en impliquant toutes les parties prenantes dans le processus, y compris les collaborateurs dans l’atelier de production. Ceux-ci savent ce qui s’y passe et auront généralement de bonnes idées. En les impliquant, ils seront aussi directement plus motivés."
Ne pas connecter pour connecter
A côté de cela, il faut aussi savoir très clairement pourquoi vouloir connecter l'environnement de production.
"Un atelier de production connecté ne doit pas être une fin en soi", déclare Jakob. "Il ne faut pas l’envisager parce qu'il y a de plus en plus d'entreprises qui le font, mais bien parce que cela vous aidera à relever certains défis. Il existe effectivement des entreprises qui ont ici raté le coche en tirant désormais énormément de données de leur production dont elles ne font, ensuite, rien." En d'autres termes, inspirez-vous de ce que vous voyez dans d'autres entreprises, mais évitez de les copier aveuglément.
"Notre première étape consiste toujours à vérifier si connecter la production représentera une plus-value suffisante pour l’entreprise. S’il sera parfois préférable de commencer par d'autres mesures, je pense cependant que tout le monde – des menuisiers qui travaillent encore manuellement aux entreprises ayant déjà investi dans des machines informatisées – peut prendre des mesures pour avancer, à son rythme, vers la digitalisation. Il faut adopter un état d'esprit ‘digital’, ce qui n'est pas évident. On ne change pas la culture d'une entreprise du jour au lendemain. Je me souviens d'une entreprise qui avait mis en place un système de planification digital fantastique, mais qui a dû faire marche arrière parce que les opérateurs ne l'utilisaient pas. Parfois, des cartes rangées visuellement par ordre de priorité fonctionneront mieux.
Assurez-vous donc que votre entreprise soit prête à accueillir la nouvelle technologie que vous souhaitez introduire", indique Jakob. Investissez non seulement dans les systèmes, mais aussi dans la formation et le coaching si nécessaire. En tant qu'entreprise, il faudra disposer d'une certaine marge de manœuvre pour absorber les connaissances acquises.
"Après le Covid surtout, de nombreuses d'entreprises ont maintenant besoin de toutes leurs ressources pour la gestion opérationnelle. Si vous voulez que les changements soient vraiment durables, il faudra pouvoir y investir du temps."
Pour chaque parc de machines?
Savoir si et dans quelle mesure un parc de machines pourra être connecté constitue une question chaque fois unique.
"Il s'agit toujours d’examiner quelles sont les options possibles", dit Jakob. "Le parc s’apparentera parfois à une combinaison de machines 'anciennes’ et nouvelles. Il faudra alors examiner quels protocoles vous pourrez utiliser et comment capter les données. Nous sommes ici partisans des standards ouverts afin que votre parc de machines reste flexible, modulaire et extensible, et que vous ne soyez pas dépendant de tel ou tel fabricant de machines."
Contrairement à ce que l'on pourrait croire, il n'est absolument pas nécessaire de disposer des machines les plus high-tech pour envisager la production connectée.
"Même avec des machines plus anciennes, vous pourrez souvent capter les données souhaitées via les interfaces présentes. Vous pourrez aussi parfaitement connecter une seule machine et déjà en tirer profit." La production connectée et les autres innovations technologiques ne sont donc assurément pas réservées aux grandes entreprises. "Comme le disait un de nos clients: ‘Plus votre entreprise est petite, plus la transition sera facile’. C'est tout à fait vrai. Dans une grande entreprise, il faudra déplacer une masse critique beaucoup plus importante, alors que dans une petite entreprise, la transition pourra s’effectuer à court terme."
Qu'est-ce que cela peut rapporter?
Telle est la question que tout le monde se pose, poursuit Jakob. Les entreprises aiment savoir à l'avance ce que l'investissement leur rapportera.
"Nous sommes dès lors en train de développer une méthode pour faciliter les calculs de retour sur investissement. Celle-ci ne donnera cependant jamais un chiffre exact, car il y aura toujours des facteurs imprévisibles. Souvent, ce n'est que plus tard que vous remarquez qu’il reste des avantages que vous n'auriez jamais pu anticiper. S'attarder longtemps sur ces chiffres ne rapporte pas toujours grand-chose. Je suis plutôt partisan de l'approche pragmatique: quels avantages cela va-t-il vous apporter et qu'est-ce qui vous attend si vous ne le faites pas?"
Des questions fascinantes à méditer.
Lire cet article gratuitement ?
Il suffit de créer un compte gratuitement.
-
Lire quelques Plus articles gratuits chaque mois
-
Choisissez vous-même les articles que vous souhaitez lire
-
Restez informé via notre newsletter